« Mon île au loin ma Désirade »
Apollinaire, La Chanson du mal-aimé.
J'ai été choisi parce que j'étais le plus à même
De déjouer tous les pièges qui m'amènent
Chaque membre de mon village m'a donné
Le peu qu'ils avaient de monnaie
Pour déjouer les pièges
Je leur rendrait au triple
Là-bas la terre est fertile
Les pousses passeront les promesses des hommes
Une fois passée la mare nostrum
Fébrile l'émoi sonne
En moi
Comme au temps on l'on moissonne
Mais chaque désert exige
Qu'on lui verse sa part
Je pars et il ne reste
Rien dans ma main de la manne
Qui permet d'aplanir les montagnes
Les épreuves comme l'acide l'ont dissout
Et dix sous ça ne fait pas beaucoup
Une fois que je n’eus plus rien sur moi
Les nues mêmes le sont moins que moi
Je me suis vendu
Depuis combien de fois
Ai-je été revendu
Je ne compte pas
Car je ne compte plus
Et aujourd'hui sur le front de mer je te fais face
Le vent ride ton visage
Usé
Je serai rusé comme
Le fils de Laërte et d’Anticlée
Le soleil est roi
Le soleil est borgne
Dans notre royaume
Et les hommes
S'aveuglent à le regarder
Oh dis c'est encore loin
L’Angleterre
on dit qu’sait
Aussi loin qu’Ithaque
Dans l’Odyssée
Enfermés entre les quatre mers de leur continent
Seul leur cellulaire touche l’autre monde
Par le chemin des ondes volent au-dessus de l’onde
L’humanité dérive plus que les continents
Je viens frapper contre toi
Méditerranée t’empoigner Méditerranée
Porte close sans poignée Méditerranée
Pardonne-moi si je médis
Méditerranée
Je te maudis Méditerranée
Tu ne dis mot Méditerranée
Toi que l’on ne peut saisir
Toi qui s’enfuit entre mes doigts
Mais qui résiste
Plus que le fer plus que le bois
T'as un avant-goût de Channel
Mais c’est une autre paire de manches
Mer du milieu qui sépare
Mur infranchissable
D’un politique déraillé
Railleuse Désirade
Je viens frapper contre toi
Méditerranée t’empoigner Méditerranée
Porte close sans poignée Méditerranée
Pardonne-moi si je médis
Méditerranée
Mais nul ne s’y trompe
Seuls les touristes s’y trempent
Y a du Trump entre les tempes
Et moi
Je suis de la trempe des marins qui ne savent pas nager
Mais je rêve que je nage
Malgré mon jeune âge
La meute des vagues écume et gronde
Garde jalousement l’autre côte
Mord nerveusement l’étrave
Des navires qui s’y engagent
Au loin tremblent comme des mirages
Ceux qui s'y naufragent
J’ai peur de me noyer
Mais qu’importe le breuvage
Je veux marcher sur l’eau
Comme font les nuages
Mais rien n’y fait
Je pleure telle une princesse de Phénicie
Quand Enée l’a fuie
Par-delà l'étendue marine
J'espère en la main tendue
Du Péloponnèse
Plutôt qu'en la botte qui piétine
Y a toujours plus d'hommes
Et pas plus d'humanité
Je sais pourquoi les sirènes les dévorent
Et Circé les change en porcs
Ouais maintenant je sais
Mais tu ne t’appartiens pas toi-même
Mare nostrum
En somme
Tu n’es
Que ce qu’en font les hommes
Mais tu ne t’appartiens pas toi-même
Mare nostrum
En somme
Tu n’es
Que ce qu’en font les hommes
Si vous souhaitez écouter Franck, cliquez ici Méditerranée by T. O.
コメント