Feuillette les arbres
livres ouverts sur les veines du temps
Écorces, brunes, épaisses, rugueuses, lisses, parfois noires
dans les matins légers, les crépuscules fauves, les nuits obscures,
Les racines du grand chêne ouvert sur les souvenirs
du vent qui Passe
plongent dans la terre encore froide
Le printemps est timide
La bergerie en ruine toute proche
raconte si on l'écoute
les instants de repos dans I'ombre fraîche
de la ramure déployée
sous le soleil brûlant d'un après-midi d'été
Ne reste que le léger bruissement des feuilles
à peine un bruit.
Feuillette les arbres
Livres ouverts sur les veines du temps
Les feuilles rousses d'automne
Craquent sous les pas des marcheurs étonnés
de tant de couleurs
de tant de silences blancs
de tant de fatigues
de tant de désirs.
Lignes de Partages centenaires
entre les troncs épais
Sans oubli, ni vertige
Sans oubli ni vestige.
Feuillette les arbres
Livres ouverts sur les veines du temps
Le pin accroché aux rochers blancs d'Ithaque
contemple l'azur de la mer infinie
Gardien unique, il guette celui qui s'est perdu
Vingt aunées durant
Il entend le fracas des batailles lointaines
les cris des naufragés de la misère et de la peur
Il voit des épaves de bois échouées sur le sable
des formes étranges, des branches brisées
au fil de l'eau emportées
Une tempête.
La patience de l'arbre est immuable
malgré les embruns qui le fouettent
Il n'attend pas le massacre des prétendants
Les histoires d'hommes se ternissent de sang
Souvent.
Feuillette les arbres
Livres ouverts sur les veines du temps
Un cercle de feu éteint
Les forêts épaisses se donnent des allures médiévales
Entre les grands mélèzes des ombres se faufilent
fantômes de chevaliers errants
qui tournent encore et encore
Les guerriers de I'hiver s'étendent
les uns contre les autres pour se tenir chaud
troupeaux de bois morts
abattus le long des rivières
qui hésitent à ruisseler
Il faudrait creuser la terre, la retourner
voir sous la croûte comme les sangliers
avec nos groins et nos défenses
S'enfoncer les mains dans le crâne
attraper ces syllabes câlines
qui n'arrêtent pas d'espérer
L'éternité.
Feuillette les arbres
Livres ouverts sur les veines du temps
Photos : Guy TORRENS
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