
Au fil de l’eau, file le temps.
Le fleuve gelé, laisse sourdre la mémoire de l’eau.
Une mémoire de sources, frémissantes, ondoyantes
à peine un mouvement.
Une mémoire de soif à étancher
sur des terres arides craquelées, presqu’oubliées,
de puits asséchés irrigués des larmes de ceux qui n’en n’ont plus.
Une mémoire de barrages qui submergent
des villages endormis, fantômes des profondeurs
présents/absents/présents/absents suivant les saisons,
de canaux d’une nostalgie sublime
quand un soleil froid se repose
derrière une écluse
attendant que passe une péniche.
Une mémoire de pluies qui s’abattent
comme des harpies
sur des troupeaux affairés
à la mange herbe.
Une mémoire de corps qui s’ébattent
dans la joie d’une fin d’été brûlant.
Une eau de la peau au goût de mer profonde.
Au fil de l’eau, file le temps.
Embouchures/deltas/
Méandres de fins de voyages lascifs
sous les cris des mouettes rieuses
des cormorans noirs.
Mélange des eaux, ligne de partage
Douceur saline, amertume du fleuve
de cette fin inéluctable/toujours recommencée.
Les courants soulèvent pour cette ultime fête
une poussière aussi fine
que la sueur glacée des poissons.
Plus vifs, ils secouent le sable du fond.
Celui des bleus profonds
où les Sirènes se reposent de leurs chants.
On entend certains jours de grand vent, de tempête
des voix profondes, des voix de baryton sous les bancs de sables.
Cornes de brumes, plaintes étouffées
Chants des grands eucalyptus ?
Le mystère est là dans les lieux désertés.
Au fil de l’eau , file le temps.
Le fleuve a charrié des branches, des troncs
arrachés aux rives trop proches, aux berges inondées
les jours de fureur diluvienne.
Il a des vagues de bois
qui se déroulent/tournent/s’écrasent
creusent des falaises de sable.
Une épave au milieu d’un tourbillon de détritus
que la mer rejette pour dire :
ce n’est pas à moi
reprenez, les plastiques, les vieux bidons, les bouteilles !
Elle vomit les résidus de l’homme.
Au fil de l’eau, file le temps.
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